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Dailymotion, un soutien en développement

15 Mar

La plateforme française de diffusion Dailymotion s’est toujours intéressée à la websérie. Depuis, elle apporte sans cesse de nouveaux moyens pour aider ses « motion makers ». Explication avec Frédéric Fleurier, responsable du programme Motionmaker à Dailymotion.

Webzeline : Comment Dailymotion a tissé ses liens avec le format de la websérie ?

Fréderic Fleurier : Cela s’est fait au fil du temps. Quand je suis arrivé en 2007 au contenu des programmes courts, associé aux webséries, le premier fut le blog vidéo de Luciano par Nicolas Mazière, également créateur des Puceaux et du blog de Nicolin. C’est un concept assez simple : un personnage nunuche, fan de Bruel, face caméra, exécutant des sketches assez simples. Puis on a découvert et mis en avant Hello Geekette, une vraie websérie en tant que tel, avec trois saisons, et qui a fait presque 2,5 millions de vues. Après quelques autres petites webséries, il y a eu ce qu’on appelle ici l’effet Descraques (ndlr : réalisateur de la websérie Le Visiteur du futur). François a posté le premier épisode du Visiteur du futur en avril 2009. On l’a vite repéré mais, à l’époque, on ne savait pas que c’était une websérie, Descraques non plus d’ailleurs. Une fois mis en avant en vidéo star, la vidéo a eu plus de 20 000 en 24h, pas mal pour une vidéo dénichée à la dernière minute ! Comme le succès a continué avec les épisodes 2 et 3, grâce à la communauté dailymotion qui a suivi, François a décidé d’en faire une saison complète. On l’a aidé du mieux qu’on pouvait à l’époque, c’est à dire en mettant chaque épisode en vidéo star. C’était toujours très bien écrit et bien joué, même si le cadrage au début donnait une impression un peu amateur faute de moyen. La première saison fut donc un carton, entre 60 000 et 70 000 vues par jour. Après le dernier épisode, nous lui avons proposé une séance dailymotion pour rencontre les fans, car un succès aussi rapide peut vite vous dépasser ! La deuxième saison fut encore un succès, surtout qu’on était rassuré quant à la qualité de la websérie. Aujourd’hui, sur toutes les vidéos Descraques, on a un total de 5 millions de vue (environ 150 000 vues par épisode).

W. : Qu’est-ce que l’effet Descraques a changé ?

F.F. : Je pense qu’il y a eu une véritable  identification de la part des spectateurs à un nouveau format de fiction sur le web, très accessible. Une websérie que l’on peut faire entre potes le week-end, sans avoir besoin de beaucoup de moyens, juste l’envie. Plus besoin d’être professionnel. On a alors vu fleurir des centaines de webséries, de toutes les qualités : des programmes très propres, portés par une société de production, et des vidéos plus amateurs de générations plus jeunes. Mais le principe de la série feuilletonnante s’est alors bien ancré. Devant le nombre croissant de webséries recensées (en trois ans, on est passé de quinze à plus de cent webséries), Dailymotion a eu la volonté de créer une première page portail websérie pour donner un coup de pousse à chaque personne, en mettant au moins un épisode en page d’accueil lorsque l’on déniche un bon concept. On procède de deux manières : en interne, on fait un travail éditorial constant, on regarde ce qui se passe à droite à gauche. Sinon, via le programme Motion Maker, on surveille ce qui arrive. On va bientôt mettre en place un véritable portail websérie pour recenser nos webséries et amener les gens à poster leur vidéo sur dailymotion. On leur fourni une adresse email pour nous contacter directement et se faire référencer. C’est un point d’entrée facile pour les utilisateurs et cela a positionné Dailymotion comme la seule plateforme vidéo qui s’intéresse à ce format.

W. : Qu’est-ce que le programme Motion Maker ?

F.F. : Motion Maker est né en 2007 du constat que, sur internet, on trouvait des créations qu’il n’y avait nul par ailleurs. Court-métrages, clips, animations, des personnes aiment la liberté que leur donne ce nouveau moyen où il n’est pas nécessaire d’avoir de gros moyens. C’est le cas, par exemple, de l’étudiant en école de cinéma ou d’animation qui travaille le soir tout seul derrière son ordi pour faire son court-métrage ou sa vidéo. Quand il la poste, c’est viral, ça circule, tout le monde finit par l’avoir vu et la relaie sur le web. Mais plus personne ne sait pour autant le nom du réalisateur derrière. Le but était donc de redonner une identité au contenu, de rattacher la vidéo à son réalisateur et surtout de faire que les vues se fassent sur un seul et même player ou compte professionnel. Ainsi, il y a une mise en avant et une identification claire des talents qu’on ne trouve que sur internet, avec une liberté de ton. Il suffit de faire la demande sur le site. On fait un petit tri, bien sûr. L’équipe de modération sélectionne assez largement, sans placer de grosses contraintes, parce qu’un premier mauvais court ne veut pas dire que le prochain ne sera pas une perle. Il faut laisser sa chance aux gens qui ont de plus en plus accès à du matériel de qualité. Ensuite, on essaie de rencontrer les motions makers et de trouver le meilleur moment pour les mettre en avant. Cela tisse un réseau intéressant de réalisateurs, spécialisés dans le web, et cela permet d’aider les jeunes artistes de pouvoir montrer leur travail. Aujourd’hui, nous avons 40 000 motion makers.

W. : Parlez nous des séances Dailymotion ?

F.F. : Depuis maintenant cinq ans, nous organisons une fois par mois une séance dailymotion au Cinéma des Cinéastes. Au départ, on y projetait un mix de ce que l’on trouvait intéressant et de qualité. Maintenant, on donne à des réalisateurs avec de grosses communautés le soin d’y programmer leur travail. C’est important de sortir les créateurs du web pour les amener vers le cinéma.

W. : Quelles aides financières Dailymotion peut-elle apporter au créateur ?

F.F. : Dailymotion peut désormais apporter une véritable aide financière aux créateurs. Il y a d’une part le partage des revenus sur la publicité de la vidéo qui est possible. De plus, nous avons mis en place un partenariat avec Ulule qui nous permet des micros-investissements : on a aidé une soixantaine de projets en deux ans, à hauteur d’environ 500€ par projet. Il y aussi la Bourse Dailymotion, lancée il y a deux ans. On reçoit entre 300 et 400 dossiers à chaque session, on en présélectionne une cinquantaine qui sont vus par un jury professionnel. Une dizaine est ainsi choisie pour un budget de 50 000€ par session.

Enfin, il y a l’ouverture prochaine des studios dailymotion, un véritable lieu de création avec du matériel de studio à destination des motion makers qui n’ont pas accès à assez de moyens techniques. Il faut bien sûr être motion maker pour en bénéficier. Bref, nous sommes en constante réflexion stratégique sur l’aide que l’on peut apporter au créateur, sur l’amélioration du système de coproduction. On a fait de sacrées avancées par rapport à 2007 !

W. : Comment voyiez-vous le futur de la websérie ?

F.F. : Je suis persuadé que le futur websérie au beau fixe. Aujourd’hui, la fiction web est complètement ancrée dans l’internet, même les annonceurs s’y mettent comme par exemple BNP Paribas avec Mes Colocs. Il restera encore bien sûr une différence de qualité évidente entre les webséries amateurs et celles plus professionnelles, mais avec l’ouverture et le succès des sites de crowdfunding, on voit s’élargir de plus en plus l’autoproduction de qualité. C’est une nécessité, car qui dit professionnalisation dit difficulté de plus en plus grande à se démarquer, au vue la qualité générale qui augmente depuis deux ans.

De plus, on a un engouement de plus en plus important de la part du public. L’importance des communautés dépend bien sûr des webséries. Elles peuvent être énormes tout comme peu importe, mais on fait ce qu’on peut pour les fédérer.  Par exemple, on organise le prix de la meilleur websérie du Montreux Festival, le Montreux Comedy Awards, où ce sont les communautés qui votent. Les projets ayant reçus le plus de votes sont sélectionnés puis jugés par des professionnels… car beaucoup de votes ne veut pas forcément dire la meilleur qualité ! Les premières webséries ont récolté  plus de 1500 votes comme Les histoires du vieil oncle farmer : cela fait vivre le projet par les fans et ça mobilise les gens et les communautés. Elles le font en utilisant des réseaux sociaux, surtout facebook et la page fan de la websérie.

W. : Et pour Dailymotion, le futur de la websérie ?

F.F. : Sur Dailymotion, nous allons donc créer un nouveau portail dédié aux webséries, avec un classement, des archives,… Le nombre de vidéos augmentant, on a besoin d’un portail clair et bien construit où, chaque jour, on puisse mettre en avant tous les épisodes d’une websérie. D’ailleurs, ça va devenir une chaîne prochainement, en plus du portail ! Les utilisateurs pourront uploader la vidéo directement. Nous, nous serons plus à même de les repérer et les organiser. De plus, tous les week-ends, on continuera à mettre en avant les websérie du Studio 4.0 de France 4 avec lequel on est partenaire.

W. : Pour finir, des coups de cœur récents dans les webséries?

F.F. : C’est très difficile de choisir ! Bien sûr, il y a le cultissime Visiteur du Futur, mais aussi Françis et Stéphane de Mectoob, Je tue ma femme, DRH, Tics,… Et encore pleins de belles découvertes à faire !